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Le frelon asiatique a t-il des ennemis ?

Le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax) – aussi appelé frelon à pattes jaunes – est arrivé en France en 2004, en s’implantant d’abord dans le département du Lot-et-Garonne. Cet insecte de l’ordre des Hyménoptères a été introduit en France en provenance de Chine. Il s’est ensuite répandu dans tout le sud-ouest et les autres régions de France par colonisation naturelle ou bien en profitant des transports de marchandises.

Il s’agit d’un colonisateur performant qui avance de 100 km par an. En effet, le frelon asiatique est très prolifique. Chaque nid produit à l’automne un grand nombre de reines qui seront tout autant de fondatrices d’autres colonies l’année suivante.

Fin 2020, Vespa velutina était présent sur tous les départements de France métropolitaine, mais aussi en Suisse, en Belgique, au Luxembourg, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Espagne, au Portugal et en Italie.

frelon asiatique
Le frelon asiatique – comme tous les frelons et guêpes – chasse des insectes et notamment des abeilles pour nourrir ses larves, mais les adultes sont essentiellement nectarivores. Source photographique : Pixabay.

Cet envahisseur pose des problèmes sérieux aux apiculteurs, mais plus largement aux personnes qui s’exposent à leurs piqûres. De nombreuses personnes – chercheurs, désinsectiseurs et apiculteurs – expérimentent et mettent en place des méthodes et des traitements. Cet article présente quelques ennemis, parasites et prédateurs du frelon asiatique que l’on retrouve en Europe. Nous vous souhaitons bonne lecture.

Agents pathogènes et prédateurs

Au sein d’un écosystème non perturbé s’établit des équilibres entre des populations de prédateurs ou de parasites et leur proies ou hôtes. Malheureusement cette situation de régulation n’existe plus dès lors qu’un insecte est introduit dans une région d’où il est étranger. Si le climat et les ressources en nourriture lui conviennent, l’animal se multiplie et échappe au contrôle des maladies et de la prédation. Les insectes et en particuliers les guêpes et frelons colonisent efficacement est rapidement de nouveaux territoires. Lorsqu’ils s’implantent quelque part, ils sont très difficile à arrêter. En fait aucune espèce de guêpe ou de frelon invasif n’a été anéantie.

Le nématode Pheromermis vesparum

Certains parasites infectent les frelons et causent leur mort. C’est par exemple le cas de Pheromermis vesparum qui dévore le frelon de l’intérieur. Mais il n’existe par pour le moment d’application pour lutter contre le frelon asiatique.

Cycle du parasite Pheromermis vesparum. Crédit : CNRS, wikipedia

Le frelon européen Vespa crabro

Le frelon européen est de taille supérieure au frelon asiatique. Lorsque les deux espèces sont présentes sur un rucher – Vespa crabro est également un prédateur des abeilles – le frelon européen fait souvent la course à son cousin asiatique. Mais il est aussi possible que la concurrence entre reines de frelons asiatiques et reines de frelons européens ne soient souvent défavorable à ces premières.

Reine de Vespa crabro
Reine de Vespa crabro qui débute la construction d’un nid. Crédit photographique : Pixabay.

En France, Vespa crabro est actuellement assez rare du fait de la lutte que l’Homme mène. Mais des scientifiques avancent la possibilité d’un contrôle exercé par notre frelon européen durant l’implantation de nouveaux nids de Vespa velutina. En effet, la lutte est rude entre les fondatrices pour trouver un site convenable pour y établir une colonie. D’ailleurs les jeunes reines Vespa velutina s’entretuent au début du printemps pour récupérer les meilleurs emplacements.

L’abeille mellifère

L’abeille est clairement défavorisée face aux frelons asiatiques. Il n’empêche qu’elles déploient pour protéger leur nid, des stratégies de défense. Il peut alors arrivé qu’un frelon asiatique qui se pose sur la planche d’envol d’une ruche, soit attaqué par les sentinelles, puis par un grand nombre d’abeilles.

abeilles mellifères devant leur ruche
Les abeilles mellifères sont capables de supporter les agressions de Vespa velutina tant que la pression des assaillants n’est pas trop forte. Source photographique : Pixabay.

Mais Apis mellifera n’a pas mis en place les modes de défense de sa cousine asiatique, Apis cerana. Cette dernière est plus efficace lorsqu’il s’agit d’attaquer un frelon posté devant une ruche. Ces abeilles l’attaquent et forment autour de lui une “heat ball”. Des dizaines d’abeilles recouvrent le corps du frelon et se mettent à produire de la chaleur en faisant vibrer les muscles de leur thorax. La température monte à 48 °C et tue le frelon.

L’Homme

Dans certaines régions de son aire de distribution naturelle, les larves de frelon asiatique asiatiques sont consommées et leur prix en suffisamment élevé pour que des personnes chassent les nids de Vespa velutina.

L’apiculteur

Les apiculteurs sont particulièrement concernés par l’invasion du frelon asiatique. Cette espèce est nuisibles, car les ouvrières sont de redoutables chasseuses d’abeilles. Dans certaines régions de France, la pression est tellement forte que des ruches sont décimées si aucune prévention ou lutte n’est mise en place.

Les frelons asiatiques capturent les abeilles sur les fleurs qu’elles butinent, mais plus souvent devant le trou d’envol de leur nid. La colonie d’abeilles est ainsi assiégée et les butineuses stressées limitent leurs déplacements. Les rentrées de nectar et de pollen se font insuffisantes. En plus de la prédation, les abeilles souffrent alors de la faim et dans les cas extrêmes, la colonie affaiblie se dépeuple. Elle sera finalement envahit par les frelons qui détruiront le couvain. Mais les survivantes peuvent aussi se trouver en difficulté pour passer l’hiver ou pour lutter contre des maladies.

La muselière pour ruche

Les frelons asiatiques ont comme stratégie de se poster en vol stationnaire à quelques centimètres de l’entrée d’une ruche pour attendre les butineuses de retour au nid. C’est durant leur décélération qu’elles sont plus vulnérable. Un frelons reste souvent moins d’une minute avant de capturer une abeille.

Pour le gêner, les apiculteurs ont mis au point des muselières qui sont des cages grillagées placées devant la planche d’envol. Les mailles du grillage sont assez large pour laisser passer les abeilles. Mais elles posent problème aux frelons. Ces derniers lorsqu’ils parviennent à entrer à l’intérieur des muselières n’y reste pas car le confinement semble les stresser.

Le piégeage des fondatrices et des ouvrières

L’apiculteur peut limiter la prédation en plaçant à proximité de ses ruches des pièges. Le piégeage se fait durant une grande partie de l’année. Avant et après l’hiver, l’action se concentre pour piéger et tuer les jeunes reines. Puis durant l’été, il faut concentrer la lutte en capturant les ouvrières.

Pose d’un piège à frelons avec mélange attractif.

Une fondatrice frelon – contrairement à une reine d’abeille qui essaime avec une partie de sa colonie – doit chercher pendant quelques temps de la nourriture pour survivre, mais aussi pour nourrir les premières larves de son nid. Elle sera particulièrement attirée par les liquides sucrés. Un mélange bien connu consiste à apporter à part égale du sirop de cassis, de la bière brune et du vin blanc. L’alcool éloigne les abeilles, mais attire les frelons. Malheureusement, ce type de pièce n’est pas suffisamment sélectif et beaucoup d’autres insectes et notamment des Hyménoptères indigènes sont tués.

Les ouvrières pour leur part sont également attirées par les protéines animales. En effet, elles doivent approvisionner les larves de leur nids d’insectes et de fragments de charognes en grande quantité. Le poisson semble être un bon appât.

Larves frelons asiatiques
Les larves de frelons asiatiques sont carnivores. Crédit photographique : Pixabay.

La raquette de badminton

Cet “outil” est de plus en plus utilisé. Les frelons postés en vol stationnaire devant les ruches, peuvent être assez facilement assommés d’un coup de raquette de badminton. Mais même en appliquant beaucoup de force, bien souvent le frelon n’est pas tué. Il faut alors l’écraser, sans quoi il s’envolera et pourrait revenir sous peu capturer de nouveau des abeilles.

L’emploi de la raquette de badminton ne permet pas de vaincre le frelon et il faut tuer chaque jour beaucoup d’insectes pour espérer contrôler leur prolifération.

Ce type de lutte mécanique n’est pas nouveau, et il est utilisé depuis longtemps pour protéger les ruches au Moyen-Orient, en Egypte (contre Vespa orientalis) et en Chine (contre Vespa velutina et d’autres espèces).

Le “cheval de Troie”

Des produits insecticides à base de Fipronil ont été autorisés pour combattre le frelon asiatique. Ces préparations sont employées en badigeonnant une ouvrière capturée du liquide toxique. L’insecte relâché, regagnera le nid et intoxiquera ses soeurs et la reine. La contamination se fait par léchage puis par trophallaxie. La toxine circule dans toute la colonie et si la dose est suffisamment forte tous les insectes meurent.

Toutefois, il faut capturer et traiter plusieurs ouvrières avant d’avoir un résultat. Si un frelon loin de son nid n’est pas agressif, il n’hésite pas à piquer dès lors qu’il se trouve capturé. Une méthode assez sûre revient à assommer le frelon au moyen d’une raquette électrique. L’électricité paralyse le frelon quelques secondes. Pendant ce temps et en utilisant de longues pinces ont peu immobiliser l’insecte et lui appliquer le liquide sur le dos et sur son abdomen.

Ce mode lutte est assez complexe à mettre en oeuvre. De plus l’emploi du Fipronil – insecticide très toxique pour les abeilles – partage les apiculteurs.

Le désinsectiseur/destructeur de nid

L’approche d’un nid de frelon asiatique est dangereuse. Un seul frelon est capable de piquer plusieurs fois consécutivement et d’injecter une forte quantité de venin. Lorsqu’une colonie se sent menacée, un grand nombre de frelons attaquent l’assaillant et la situation peut alors être très grave.

Malheureusement, l’actualité nous rappelle que chaque année en France, des personnes succombent des suites d’une attaque de frelons. Parfois, une simple piqûre est suffisante pour tuer une personne allergique.

Destruction des nids

Un apiculteur – s’il n’est pas formé et correctement équipé – ne peut pas intervenir sur un nid de frelon. Une simple combinaison d’apiculteur n’est pas suffisante pour se protéger des piqûres de frelon asiatique. Une fois repéré, un nid doit être détruit par un professionnel.

Le principal problème dans la lutte contre le frelon asiatique vient du fait que ses nids sont particulièrement difficiles à détecter. Classiquement, on retrouve les nids dans les arbres à plus de 10 mètres du sol. Mais les observations prouvent qu’une colonie peut s’établir pratiquement n’importe où : dans un grenier ou un abri de jardin, dans un coffre EDF, au coeurs d’une haie ou sous un arbuste,… Ces derniers nids sont particulièrement dangereux, car le risque d’entrer en contact avec des frelons asiatiques est alors accru.

Nid de Vespa velutina
Les nids de frelons sont souvent cachés derrière le feuillage des arbres. C’est souvent à l’automne – lorsque les feuilles chutent – qu’ils sont repérés. Crédit photographique : Pixabay.

La destruction d’un nid de frelons asiatiques consiste à injecter un insecticide à l’intérieur de celui-ci. Le nid n’est pas retiré immédiatement. En effet, les ouvrières frelons qui chassent dans les alentours reviendront dans leur nid et s’intoxiqueront par le produit insecticide. Le but est de détruire tous les insectes du nid. Car les survivants pourraient causer des nuisantes ou implanter une colonie ailleur.

Pose d’un GPS miniaturisé

Afin d’aider les apiculteurs et tous les usagers à lutter contre cet insecte invasif, des chercheurs ont mis en point une traque des ouvrières par pose d’un émetteur GPS miniaturisé. Il est alors possible de localiser le nid et de procéder à sa destruction. Ce procédé demande de capture un frelon asiatique, puis de l’équiper de l’émetteur. En plus de risquer une piqûre l’opération est délicate. Il ne faut pas que l’ouvrière soit gênée par l’appareil au risque de ne pas être capable de rejoindre sa colonie.

Pour en savoir davantage sur Vespa velutina

Le Muséum national d’histoire naturelle a mis en place un site internet dédié au frelon asiatique. En plus d’information concernant sa biologie, une carte de son avancée est actualisé et un onglet permet de soumettre un signalement des nids de frelons asiatiques. http://frelonasiatique.mnhn.fr

Youtube propose de nombreuses vidéos et des chaînes spécialisées sur Vespa velutina et les moyens de lutte déployés. La chaîne d’Eric Darrouzet, chercheur au CNRS et spécialiste des Hyménoptères et du frelon asiatique en particulier, est particulièrement intéressante.