Les abeilles sont des insectes qui vivent en colonie. Leur nid présente l’environnement idéal pour de nombreux agents pathogènes et autres pourvoyeurs de maladies. Car la nourriture y est abondante – miel, couvain et abeilles adultes – et les conditions de température et d’hygrométrie sont stables et optimales.
De plus, en saison de butinage, des milliers d’abeilles font chaque jour des allées et venues entre leur nid et les environs à la recherche de pollen et de nectar. Ces déplacements sont autant de possibilités, pour un microorganisme ou un acarien, d’être clandestinement introduit dans le nid.
Bien que vulnérables de part leur petite taille, les abeilles ont mis en place des comportements, mais aussi des réactions physiologiques pour lutter contre ces organismes indésirables. Mais lorsque les conditions environnementales ne sont pas bonnes ou que les pratiques apicoles ne sont pas adaptées, une maladie opportuniste peut se déclarer et menacer la survie de la colonie.
Quelles sont les maladies causées par des virus ?
Les scientifiques ont détecté une vingtaine de virus qui touchent Apis mellifera. Mais il est fort probable que beaucoup d’autres virus soient encore à découvrir. Ces pathogènes sont invisibles au microscope optique et il faut des méthodes sophistiquées pour les identifier.
Les virus sont des parasites obligatoires des cellules de leur hôte. Ceci signifie qu’ils sont incapables de se multiplier en dehors d’une cellule vivante. Ils emploient en effet l’appareillage cellulaire pour se répliquer en très grand nombre. Les cellules “piratées” sont généralement détruites après cette phase d’intense réplication. Les tissus et les organes de l’insecte sont atteints et sa survie est souvent engagée.
La maladie de l’abeille noire
Cette maladie est provoquée par le Virus de la paralysie chronique de l’abeille (CBPV, pour Chronic Bee Paralysis Virus). Elle touche les colonie généralement au printemps. On parle aussi de la maladie de mai. Elle est liée à l’alimentation des abeilles, et la prise de miellat est souvent un facteur déclenchant.
Les abeilles qui souffrent de cette maladie présente des troubles moteurs. Elles tremblent, tournent en rond, sont incapables de voler. On observe aussi des abeilles de taille plus petite, sans poil et de couleur foncée, d’où le qualificatif donné à cette maladie. La mortalité est importante et il n’est pas rare de trouver de nombreuses abeilles mortes devant la ruche.
La maladie des ailes déformées
Cette maladie est provoquée par le virus des ailes déformées (DWV, pour Deformed Wing Virus). Il affecte tous les stades de développement de l’abeille. Les adultes présentent des ailes atrophiées ou déformées. Les insectes sont – bien entendu – incapables de voler. Et les butineuses ne peuvent pas aller récolter du nectar et du pollen.
Ces signes apparaissent souvent à la fin de l’été et durant l’automne. Une flambée de maladie des ailes déformées est généralement corrélative à une forte pression du varroa. Cet acarien est en effet le vecteur principal de ce virus. Cet affection s’ajoute aux dégâts causés par ce dernier parasite. Il faut donc se monter vigilant, évaluer la population des varroas dans ses ruches et mettre en place un traitement adapté.
Quelles sont les maladies causées par des bactéries ?
Contrairement aux virus, la plupart des bactéries sont capables de se répliquer en dehors des cellules de l’être vivant qu’elles infectent. Les abeilles sont concernées par plusieurs infections bactériennes, dont certaines sont particulièrement graves. Toutefois, ces bactéries sont sans danger pour l’être humain, mais comme tous les agents pathogènes, elles ont un impact sur la production de miel.
La loque américaine
Cette affection bactérienne touche le couvain des abeilles. Elle est causée par Paenibacillus larvae. Ce microorganisme produit des spores qui sont capables de perdurer dans l’environnement, pendant plusieurs dizaines d’années.
La loque américaine touche les larves. La contamination se fait par l’alimentation donnée par les nourrices. Les larves atteintes vont mourrir après la fermeture de leur alvéole. Elles vont se décomposer et l’ensemble du couvain touché va dégager une odeur nauséabonde proche du poisson pourri. Les restes des larves finissent par sécher au fond des alvéoles et se transforment en amas, que l’on nomme des écailles. Chaque écaille contient des millions de spores qui pourront à leur tour contaminer d’autres larves.
Cette maladie est un fléau pour la filière apicole en général. Et la loque américaine est une maladie à déclaration obligatoire. Lorsqu’un cas est confirmé – après analyses biologiques réalisée par un laboratoire – un périmètre de plusieurs kilomètres est mis en place autour du rucher par arrêté préfectoral. Tous les mouvements de matériels, de ruches, d’essaims, de reines sont interdits jusqu’à disparition du problème. Ces mesures concernent tous les ruchers de la zone de restriction, quel qu’en soit le propriétaire.
Il n’existe pas de traitement efficace pour soigneur les colonies touchées. Il est en général procédé à la destruction des insectes – après gazage au soufre des colonies – et des ruches par le feu. Les cendres sont ensuite enterrées à bonne profondeur.
La loque européenne
Il s’agit également d’une maladie qui touche le couvain des abeilles. Mais contrairement à la loque américaine, l’agent responsable de la loque européenne, Melissococcus plutonius, ne produit pas de spore. Il est donc moins persistant dans l’environnement et présente un danger moindre pour l’apiculture. La déclaration d’un cas de loque européenne n’est pas obligatoire.
Il est possible de juguler des infections modérées par un transvasement sanitaire de la colonie. On place la reine et les ouvrières dans une ruche propre et sur des cadres de cire propres. Il faudra aussi prévoir de nourrir la colonie qui se retrouve alors sans provision de miel. Les anciens cadres – qu’ils contiennent du couvain ou seulement des provisions de miel – sont détruits par le feu.
Quelles sont les maladies causées par des champignons ?
Les champignons qui touchent les abeilles produisent soit des filaments, soit se présentent comme les microorganismes unicellulaires. Certains ont un impact fort sur les colonies d’abeilles. Et comme bien souvent, ils font leur apparition suite à des pratiques apicoles inadaptées ou suite à des conditions climatiques sévères prolongées.
Le couvain plâtré
Cette maladie touche le couvain, et est causée par Ascophæra apis. Généralement, ce mal n’apparaît après un refroidissement des larves. Ce refroidissement se produit souvent durant l’ouverture des ruches par l’apiculteur. Il faut rappeler que les visites ne doivent pas se faire durant les périodes les plus froides de l’année. Car le couvain demande une température élevée – voisine de 35 °C – et constante, pour bien se développer.
Les larves contaminées par Ascophæra apis vont mourrir et prendre un aspect momifié caractéristique. Les ouvrières – qui assure la propreté du nid – sortiront ces larves mortes de la ruche, et bien souvent les déposeront sur la planche d’envol.
La nosémose
Cette maladie fongique est beaucoup plus grave que la précédente. L’agent pathogène responsable est Nosema apis. Comme les virus, ce champignon unicellulaire doit obligatoirement infecter les cellules d’un hôte pour ce multiplier.
L’apparition de la nosémose est souvent causée par des nourrissements inadaptés. Le miel de miellat – produit à partir du miellat des pucerons et des cochenilles – est aussi responsable de l’apparition de l’infection. L’hivernage sur ce type de miel est fortement déconseillé. La nosémose se déclare aussi lorsque les conditions météorologiques interdisent aux abeilles de sortir de leur nid, pour effectuer un vol de propreté, c’est-à-dire pour déféquer.
Nosema apis touche les abeilles, chez qui il provoque une dysenterie importante. Ce champignon détruit le système digestif des abeilles et provoque leur mort prématurée. Les selles liquides sont émises aussi bien sur la planche d’envol, qu’à l’intérieur de la ruche. Ces déjections contiennent une grande quantité de spores. La nosémose est une maladie très contagieuse qui peut rapidement toucher plusieurs ruches au sein d’un même rucher.
Quelles sont les maladies causées par des arthropodes ?
Les arthropodes sont un ensemble qui comprend les insectes et les acariens. Ces derniers sont ici représentés par deux ravageurs majeurs des ruchers. L’apiculteur doit savoir les détecter et les identifier correctement. Leur présence est parfois discrète, mais ils ne demeurent pas moins redoutables.
L’acariose
L’acariose est causée par Acarapis woodi. Originaire d’Asie, cet acarien a causé de graves problèmes durant le début du vingtième siècle, en Europe et ailleurs dans le monde.
Ainsi, en Angleterre la plupart des ruchers ont été ravagées. Et l’abeille noire locale (Apis mellifera mellifera) a quasiment disparu, pour ne subsister que sur certaines îles reculées d’Ecosse. Ce fléau sera à l’origine des travaux de Frère Adam, sur l’hybridation et la sélection de races résistantes. L’abeille Buckfast – hybride entre des femelles d’abeilles italiennes et des faux-bourdons anglais – en est le résultat.
Ces acariens envahissent les trachées des adultes et causent ainsi l’étouffement des abeilles malades. Les symptômes sont proches de ceux de la nosémose. L’impact sur les colonies est assez faible de nos jours. En effet, les traitements effectués pour contrôler les populations des varroas sont aussi efficaces sur les acariens des trachées.
La varroase
Cette maladie est causée par un acarien bien connu des apiculteurs, le varroa (Varroa destructor). Ce ravageur est originaire d’Asie où il entretien avec Apis cerana une relation de parasitisme modérée. En effet, l’abeille asiatique est capable de contrôler la population des varroas par son comportement d’épouillage. Mais nos abeilles mellifères sont incapables de lutter efficacement contre ce nouvel agresseur.
Le varroa se reproduit dans les alvéoles. Une femelle va entrer dans une cellule juste avant qu’elle ne soit operculée. Ainsi à l’abri, elle va poindre ses oeufs. Du premier va naître un mâle, qui fécondera ses soeurs issues des pontes suivantes. Les varroas préfèrent s’inviter dans les alvéoles des faux-bourdons. En effet, la période de nymphose est plus longue et permet de produire davantage de varroas. Lorsque l’abeille sortira de son alvéole, les varroas seront prêts à envahir le couvain.
Les varroas se nourrissent en ponctionnant le corps adipeux des abeilles. C’est-à-dire un tissus grand qui se trouvent sous la cuticule de l’insecte. Ils affaiblissent ces dernières en prélevant des substances nutritives. Mais ils sont aussi responsables de l’inoculation de virus qu’ils propagent ainsi dans la colonie.
La varroase est une maladie qui doit faire l’objet d’un lutte active. C’est l’une des principales causes d’échec en apiculture. L’apiculteur doit évaluer la population du parasite, et en cas de besoin réaliser un traitement. Celui-ci se fait généralement après la miellée d’été. C’est-à-dire en juillet ou en août. Les molécules actives sont des acides organiques (acide formique et acide oxalique) ou des composés comme l’amitraze. Ces produits demandent de bonnes connaissances pour être employés correctement, avec efficacité et sans présenter de danger pour les abeilles et le manipulateur.
Si vous souhaitez en savoir davantage sur Varroa destructor, consultez notre article consacré à lui, ainsi que le site du laboratoire d’Estaing.
Garder vos abeilles en bonne santé est indispensable
L’apiculture est une activité plaisante, mais de plus en plus technique. De nombreux paramètres et facteurs entrent en jeu, lorsqu’il s’agit de maintenir des colonies productives en bonne santé. Mais après un apprentissage adapté, il est tout à fait envisageable de pratiquer une apiculture de loisir.
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Comment se prémunir de l’apparition de ces maladies ?
Beaucoup de maladie se déclarent suite à des pratiques non adaptées. Mais aussi parce que des mesures élémentaires d’hygiène ne sont pas respectées.
Il faut en effet nettoyer les outils qui servent au travaux de l’apiculteur. C’est le cas du lève-cadres qui peut propager les agents microbiens et leurs spores dans tout un rucher. Les ruches et les hausses doivent être désinfectées après usage. Surtout lorsqu’elles ont contenu une colonie malade ou morte.
Il est aussi important de surveiller et de limiter le phénomène de pillage. Ainsi, une colonie affamée n’hésitera pas à attaquer et à piller les réserves de miel d’une ruche voisine. En prenant du miel, les abeilles pirates vont aussi ramener des parasites dans leur nid. De façon similaire, l’opération de léchage des cadres peut présenter des risques de contamination. Il est conseillé aux amateurs de replacer les hausses et les cadres vidées de leur miel au dessus du corps de ruche. Le léchage sera effectué par les abeilles de la colonie récoltante. Le risque de propager des agents pathogènes au reste du rucher est limité. C’est bien entendu beaucoup plus difficile à organiser lorsqu’on a plusieurs dizaines ou centaines de ruches en exploitation.
Il faut aussi être vigilant sur l’origine des abeilles que l’on achète ou que l’on récupère. Un essaim “sauvage” peut aussi être porteur d’une maladie. Il faudrait idéalement posséder un rucher de quarantaine où les colonies étrangères seront soignées et observées. Dans le cas contraire adressez-vous à des éleveurs connus, pour vous approvisionner en essaims et en reines.
L’environnement d’une colonie est aussi très important, pour la santé des abeilles. Car, la plupart des maladies n’apparaissent pas si les colonies se procurent suffisamment de pollen d’une flore diversifiée. Les plantes mellifères doivent être abondantes et diverses sur l’aire de butinage. La biodiversité est un facteur de succès en apiculture.
On ne peut oublier le frelon asiatique en parlant de santé des abeilles. Ce prédateur originaire d’Asie et introduit en France en 2004, a envahi en quelques années l’hexagone et à franchi les frontières. Les frelons asiatiques sont de redoutables prédateurs. Lorsque leur pression est forte, les abeilles assiégées dans leurs ruches ne sortent plus pour butiner. La colonie manque alors de pollen et de miel. Il n’est pas rare que ces colonies n’en meurent.
L’emploi en agriculture de pesticides pose problème aux abeilles et à l’apiculture. Certains produits sensibilisent les abeilles qui sont plus susceptibles aux agents pathogènes. De plus, les abeilles intoxiquées ont des capacités de mémorisation diminuée et plus enclin à la dérive ou à se perdre.
Il ne faut pas oublier que les facteurs de stress – maladie, pesticide, prédation – ont une action synergique. Et que des maladies sont souvent opportunistes. En apiculture, comme dans toutes les activités d’élevage, la prévention et l’adoption d’un itinéraire technique qui a fait ses preuves, donnent les meilleurs résultats.