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Le Varroa

Les abeilles mellifères sont naturellement touchées par de nombreuses maladies. Mais cette pression s’est intensifiée avec l’introduction de parasites étrangers, involontairement introduits par l’Homme. Parmi eux, le varroa est l’un des plus redoutables ennemis d’Apis mellifera. Il est le fléau qui pose le plus de problèmes aux apiculteurs en France. Cet article se propose de faire une introduction sur un sujet qui demeure complexe. Nous vous souhaitons bonne lecture.

L’ennemi apicole n°1

Répondant du nom scientifique de Varroa destructor, ce parasite a été introduit par inadvertance – durant les années 1970 – en Europe. Il provient d’Asie orientale, où il est inféodée à l’abeille Apis cerana. Cette dernière espèce est proche de l’abeille mellifère. Le varroa n’a pas rencontré de difficulté pour passer d’une espèce à une autre. D’autant plus que l’abeille mellifère n’a pas développé de mécanisme de défense. Face à un hôte peu résistant, le varroa est maintenant implanté dans les ruchers d’Apis mellifera, dans de nombreuses régions du monde.

On a longtemps pensé que les varroas se nourrissaient seulement de l’hémolymphe de l’abeille. L’hémolymphe est un liquide biologique que l’on compare souvent au sang des animaux vertébrés. Mais des recherches réalisées en 2019 ont révélé que cet acarien se nourrissait en fait du corps gras de l’abeille. Cette observation a été vérifiée en laboratoire, en donnant à plusieurs lots de varroas des aliments différents. Ceux qui ont reçu une alimentation composée seulement d’hémolymphe n’ont pas survécu longtemps.

Le varroa est un important vecteur de virus, et son action parasite est souvent accompagnée par d’autres maladies des abeilles. On désigne par varroose (souvent nommée varroase ou varroatose) les symptômes et les dégâts provoqués par une infestation de varroas.

Les varroas sont bien souvent responsables des pertes hivernales des colonies qui concernent de nombreux apiculteurs amateurs ou professionnels. Cette réflexion est partagée par la plupart des apiculteurs expérimentés et autres spécialistes en santé de l’abeille. Et comme il est précisé sur le site www.aquaramiaud.com : “la première raison d’échec et de la perte hivernale ne sont pas les insecticides et autres, mais le varroa!”

varroa destructor sur abeille apis mellifera
Les varroas se fixent sur l’abdomen ou le thorax des abeilles adultes et s’alimentent des corps gras de l’insecte. Crédit photographique : Pixabay.

En effet, l’impact de ces acariens est tel que les abeilles d’hiver – trop affaiblies et dont l’espérance de vie a été réduite – ne parviennent pas à relancer l’élevage des larves au printemps. La colonie est alors condamnée à disparaître. Il est donc important de lutter contre le varroa dans son rucher, pour réduire la mortalité hivernale, mais aussi pour maintenir des colonies suffisamment populeuses, afin de profiter des miellées de printemps.

De plus, les ouvrières qui sont parasitées par des varroas ou qui l’ont été durant leur vie larvaire, possèdent un corps gras moins développé. Elles sont par conséquent plus fragiles aux agressions de l’environnement (polluants, micro-organismes,…) et sont aussi de moins bonnes nourrices. La quantité de gelée royale et sa qualité sont affectées. Car le corps gras joue aussi un rôle dans la production de cette substance nutritive que les ouvrières donnent aux larves et à la reine.

Le cycle de vie du parasite et sa dynamique de population

Les varroas sont dépendants de la présence du couvain des abeilles pour se reproduire. C’est quelques heures avant l’operculation d’une alvéole contenant une larve, qu’une femelle varroa fertile – nommée fondatrice – va s’introduire.

La fondatrice va ponctionner la larve qui se transforme bientôt en nymphe. Elle va pondre des oeufs. Le premier varroa à naître est un mâle. Puis d’autres oeufs sortiront des femelles. La métamorphose et la fécondation des jeunes femelles va se dérouler à l’abri de l’opercule. Et lorsque l’abeille va sortir de son alvéole, les jeunes femelles et leur mère vont poursuivre leur vie. Le mâle par contre va mourir, car il est incapable de se nourrir seul et sa cuticule ne lui permet pas de survivre à la déshydratation.

Acariens de l’espèce Varroa destructor au fond d’une cellule au milieu du couvain. Crédit photographique : Pixabay.

Les varroas que l’on retrouve en dehors des alvéoles, fixés sur les abeilles sont nommés varroa phorétique. Il s’agit des jeunes femelles qui vont passer une semaine à se nourrir du corps gras des jeunes ouvrières. Ce délai est nécessaire afin qu’elles développent leurs organes de reproduction. Elles seront ensuite capables d’entrer dans une alvéole pour parasiter à leur tour une larve d’abeille.

Une femelle varroa peut vivre deux à quatre mois. Elle va donc parasiter durant sa vie plusieurs larves et se reproduire ainsi plusieurs fois. Cette fécondité importante explique la forte dynamique de population chez cet acarien. Durant la saison apicole, la population de varroas double tout les 20 jours. Ainsi, les apiculteurs doivent surveiller tout au long de l’année le degré d’infestation.

Si vous souhaitez en apprendre plus sur la biologie du varroa et son pouvoir pathogène, consultez le site https://varroa-destructor.fr

Comptages et traitements des varroas

Il est parfois difficile d’apprécier la pression parasitaire subie par une colonie d’abeilles. Et l’on peut alors ne pas traiter suffisamment tôt une infestation d’acariens.

Les varroas sont de petite taille et peuvent se fixer sur les abeilles, sans être forcément visibles. Si on en observe parfois sur le thorax des abeilles, beaucoup s’accrochent sur la face ventrale de l’abdomen. Ou bien sont dissimulés sous d’un des segments de celui-ci.

Il est donc impossible d’évaluer le degré d’infestation d’une colonie par inspection des ouvrières sur un cadre. Tout au plus, la présence d’abeilles aux ailes déformées peut vous renseigner sur les dégâts de ces parasites.

Comptages des varroas phorétiques

Il est donc nécessaire d’effectuer des comptages des varroas phorétiques. Cette opération doit se faire plusieurs fois durant la saison apicole.

Pour se faire, l’apiculteur va collecter sur des cadres à couvain une certaine quantité d’abeilles adultes et les soumettre à un traitement. Le plus anodin consiste à saupoudrer les abeilles gardées dans une boîte avec du sucre glace. Puis de les secouer. Le sucre est ensuite récupéré et les abeilles libérées.

L’apiculteur compte alors les varroas qui se trouvent dans le sucre. Une autre méthode consiste à plonger les abeilles dans de l’alcool. Cette méthode est mortelle pour les insectes. Elle apporte davantage de précision pour le décompte des acariens. Mais pour l’amateur, la méthode du sucre glace est tout aussi adaptée.

L’inspection des cadres permet de détecter des abeilles aux ailes malformées, l’un des signes d’une forte pression des varroas. Crédit photographique : Pixabay.

Comptage des chutes naturelles

Plus souvent, les apiculteurs placent sous le plancher grillagé des ruches une plaque qui récupère les varroas tombés. Une fine couche de graisse permet de retenir les acariens vivants et d’éviter que les fourmis viennent prendre ceux qui sont morts.

Après trois à quatre jours, on peut compter le nombre d’acariens sur la plaque. Et l’on reporte ce résultat à une table de comparaison. En fonction de la période de l’année, le nombre de varroas n’aura pas la même interprétation.

Le comptage des chutes naturelles est simple et peut faire partie des vérifications d’usage durant la visite du rucher. Il ne nécessite pas l’ouverture des ruches et ne stresse pas les abeilles. Par contre, il est moins précis que le comptage des varroas phorétiques.

Traitements par acides organiques

Les acides organiques – acide formique et acide oxalique – peuvent donner de bons résultats, mais demandent des précautions particulières lorsqu’ils sont utilisés sous des formes concentrées. Il faut en effet, s’en protéger en portant un masque, une paire de lunettes de protection, ainsi que des gants résistants aux produits corrosifs. Car si les acides organiques peuvent être utilisés en agriculture biologique, ils ne sont pas pour autant inoffensifs.

Les acides organiques et en particulier l’acide oxalique peuvent être appliqués par dégouttement sur la masse d’abeille. Ou bien par sublimation. C’est-à-dire par la vaporisation par la chaleur de cristaux d’acide oxalique. Les vapeurs d’acides sont très irritantes et dangereuses pour l’être humain. Son emploi n’est possible qu’avec de nombreuses précautions et de bonnes protections. La sublimation est déconseillée dans le contexte de l’apiculture de loisir, notamment quand les ruches à traiter sont situées à proximité du voisinage ou d’un lieu fréquenté par d’autres personnes.

Ces traitements ont une efficacité moindre que les acaricides. Ils doivent être répétés plusieurs fois afin d’être pleinement efficaces. Les meilleurs résultats s’obtiennent lorsque les abeilles sont traitées sans la présence de couvain fermé. C’est souvent le cas en hiver, quand la reine a arrêté de pondre.

Il est important de traiter les colonies lorsque le maximum d’abeilles est présent. Il faut donc intervenir en soirée ou bien durant l’hiver lorsque la grappe d’abeilles s’est formée et que les butineuses sont rentrées dans le nid. Si on intervient en hiver, il convient d’être très rapide pour ne pas refroidir à l’excès les abeilles.

Traitement par sublimation à l’acide oxalique. Crédit photographique : Pixabay.

Traitements par acaricides de synthèse

Beaucoup d’apiculteurs emploient – sous le conseil des groupements de défense sanitaire – des bandelettes contenant des acaricides, comme l’amitraze. Ces traitements sont toxiques et ne doivent pas être employés avant la dernière récolte de miel.

Les apiculteurs posent généralement les bandelettes après la miellée d’été et les laissent durant 10 à 12 semaines en place, posées entre les cadres contenant le couvain. Les abeilles s’exposent à ces produits par contact direct. Les varroas phorétiques sont progressivement tués.

Il faut rappeler que les varroas développent des résistances vis-à-vis de ces produits. Il est donc nécessaire d’alterner les molécules employées pour limiter ce phénomène.

La vidéo suivante, présente la pose de bandelettes dans une ruche.

Traitement contre les varroas à l’amitraze : pose de bandelettes dans une colonie.

Traitements par la chaleur

Les varroas sont plus sensibles à la chaleur que le sont les abeilles. Au-delà de 40 °C, les acariens meurent. Dans la ruche on constate souvent que les femelles varroas préfèrent investir les alvéoles qui se trouvent en périphérie du cadre. Là où la chaleur générée par les ouvrières est moins importante.

Si les acariens meurent au delà de 40 °C, les abeilles survivent quelques degrés de plus, jusqu’à 45°C. Il est donc possible de traiter les cadres des ruches par hyperthermie et de réduire ainsi la population des varroas qui sont présents dans les alvéoles operculées.

Les équipements pour mettre en place ce mode de traitement sont bien plus onéreux que l’emploi des acides organiques et des acaricides. De plus, ses utilisateurs la présentent comme une méthode stressante pour les abeilles. Il faut en effet récupérer les cadres sans les insectes adultes. Les abeilles sont toutes secouées au-dessus de leur ruche. C’est la raison pour laquelle l’hyperthermie a du mal à s’imposer aussi bien chez les amateurs que chez les professionnels.

Le traitement par hyperthermie demande de prendre une nouvelle habitude et de bien maîtriser ses gestes. S’il n’est pas facile à mettre en oeuvre, il représente toutefois la possibilité de s’abstenir d’utiliser des produits chimiques qui imprègnent les cires et le miel. Ceci n’empêche toutefois de suivre la population des acariens sur le reste de l’année.

Pour en savoir davantage sur le traitement par hyperthermie et obtenir des détails sur le fonctionnement d’un équipement thermique, consultez le site de “varroa controller”.

Traitements zootechniques

Les femelles varroas semblent apprécier tout particulièrement les cellules des mâles – les faux-bourdons – car ceux-ci ont un stade de nymphe plus long. Les varroas peuvent donc s’y reproduire plus efficacement.

Une des méthodes – qui s’ajoutent à celles que nous venons de voir – est de “castrer” de couvain des mâles. Cette action est facilitée lorsqu’un cadre à mâle est introduit dans la ruche. On le retire lorsque les cellules sont operculées. Il est détruit avec les varroas qu’il contient.

Il est aussi possible d’encager la reine dans une “cage”. On la garde suffisamment longtemps pour que tout le couvain soit ouvert. Il est alors possible de traiter la ruche et d’obtenir de très bons résultats et une forte baisse de la population des varroas.

Sélection d’abeilles résistantes

Des sélectionneurs travaillent aussi sur des lignées d’abeilles capables de contrôler la pression parasitaire. Chez ces abeilles, les ouvrières sont capables de détecter leurs larves infestées par les varroas. Elles ouvrent les alvéoles operculées et éliminent les larves parasitées. La reproduction des varroas est alors très diminuée.

Le travail de sélection d’abeilles résistantes progresse petit à petit. Il représente à terme une solution qui pourrait permettre de se passer des comptages et des traitements.

Pour résumer

La gestion des populations de varroas représente le seul travail indispensable en apiculture de loisir. Depuis l’arrivée de cet acarien en France en 1984, il est impossible de laisser faire les choses sans risquer de nombreuses pertes dans son rucher.

Si vous souhaitez en savoir plus sur la biologie du varroa et sur les méthodes de lutte contre cet acarien, nous avons mis en place un module de formation. Il s’agit du module Santé des abeilles. Pour en savoir davantage, consultez le site apiculture.idlwt.com.