L’introduction d’une reine dans une colonie orpheline est l’une des activités les plus techniques de l’apiculteur amateur. Cette introduction est nécessaire lorsque l’on réalise un essaim artificiel et que l’on souhaite élever une sous-espèce, une race ou une lignée particulière d’abeilles. Elle peut aussi se faire au sein d’une colonie dont la reine est trop âgée et ne pond plus et que l’on décide d’un remérage. Ou bien lorsque la descendance de cette reine ne donne pas satisfaction : abeilles malades, abeilles très agressives, essaimages trop nombreux, performances insuffisantes pour sa pratique apicole,…
Cet article vous présente les fondamentaux de l’introduction d’une reine dans une colonie orpheline. Nous vous souhaitons une bonne lecture.
Pourquoi introduire une reine dans une colonie orpheline ?
Une colonie sans reine est une colonie dite orpheline. Lorsqu’une colonie se retrouve sans reine, après quelques heures le comportement des ouvrières change. Celles-ci sont en état de stress. Elles émettent un bourdonnement sourd caractéristique.
Pour assurer la survie du groupe, les ouvrières d’une colonie orpheline vont rechercher dans le couvain des larves âgées de moins de 3 jours, pour en faire des reines. Les ouvrières construisent au dessus des alvéoles des cellules royales de sauveté et nourrissent les larves essentiellement de gelée royale.
Si la colonie ne peut pas élever de nouvelles reines à partir du couvain, elle est alors en grand danger. À moins que l’apiculteur d’agisse, la colonie va devenir bourdonneuse, puis disparaître.
Si l’on souhaite introduire une reine, il est possible d’introduire une reine fécondée ou bien une reine non fécondée. Il est aussi envisageable d’introduire une cellule royale issue d’une autre colonie. En introduisant une reine, on gagne du temps sur un élevage classique. Car si les abeilles élèvent elles même leur reine, il faudra un mois pour que cette dernière grandisse, puis ponde. Pendant ce mois, la colonie va se dépeupler et se fragiliser, car les ouvrières ne vivent que quelques semaines.
Comment favoriser l’acceptation de la nouvelle reine ?
Dans des conditions naturelles, les colonies produisent leurs propres reines. Mais en apiculture, il est souvent nécessaire de progresser contre nature. Quelques précautions doivent donc être prises pour faciliter l’intégration d’une reine étrangère.
Vérifier qu’il n’y ait pas une autre reine
Il ne peut y avoir qu’une seule reine par colonie. Une erreur souvent commise est d’introduire une nouvelle reine, alors qu’une autre est encore ou déjà présente.
La reine présente peut aussi provenir de la division de la colonie mère. Il est donc intéressant de marquer ses reines avec un point de couleur que l’on place sur le thorax. On évite ainsi bon nombre d’erreurs.
Cette reine peut aussi provenir des cellules royales construites par les ouvrières. Il est important d’inspecter les cadres – quelques jours après l’orphelinage – pour détruire les cellules royales. Cette destruction favorisera aussi l’acceptation de la prochaine reine. Car votre colonie receveuse incapable de produire de nouvelles cellules – faute de larves suffisamment jeunes – n’aura pas d’autre choix.
Utiliser une cagette pour la mise en contact
Les abeilles peuvent s’identifier les unes des autres par leurs odeurs. Chaque colonie d’abeilles a sa propre odeur. Et bien souvent, les abeilles chassent ou tuent les intruses. Même lorsqu’il s’agit d’une reine.
Il faut donc faire attention, lorsque l’on souhaite introduire une reine étrangère à la colonie. On effectuera une mise en contact progressive. La reine – parfois accompagnée d’ouvrières de sa ruche d’origine – est placée dans une cagette en plastique.
La cagette sera placée entre deux cadres, dont les alvéoles contiennent du couvain, si possible ouvert. C’est sur ces cadres que l’on retrouve le plus de jeunes ouvrières. Ces jeunes ouvrières sont celles qui vont prendre soin de la nouvelle reine, en la nourrissant par les trous de la cagette.
La cagette en plastique laisse passer les odeurs par des séries de trous prévus à cet effet. Par contre, la reine ne peut pas en sortir immédiatement, car un accès est bloqué par un morceau de sucre candi.
Il faudra quelques jours pour que ce bouchon de sucre soit mangé par les abeilles et que la reine puisse sortir de la cagette. Mais entre l’introduction de la cagette et la sortie de la reine, la colonie receveuse se sera habituée aux phéromones royales.
Introduire sans ou avec ouvrières accompagnatrices ?
Lorsque l’on commande une reine à un éleveur, celle-ci nous est livrée dans sa cagette, avec quelques ouvrières accompagnatrices. Ces abeilles sont présentes pour prendre soin de la reine. La reine étant incapable de se nourrir seule, les ouvrières accompagnatrices vont s’en charger.
Il est parfois conseillé – avant d’introduire la reine dans la colonie orpheline – de faire sortir les ouvrières accompagnatrices. Ceci est pertinent, si vous introduisez la cagette dans une colonie qui accepte mal les reines étrangères. Mais si la colonie est assez tolérante – c’est le cas généralement des abeilles de race Buckfast – il est possible de laisser les accompagnatrices avec la reine.
La visite de contrôle
Une fois que la cagette est placée entre deux cadres, on referme la ruche. Un nourrissement au sirop peut-être effectué le soir même. Et on laisse la colonie totalement au calme pendant cinq jours à une semaine. Pendant ce temps les ouvrières vont consommer le sucre candi qui ferme la cagette et la reine va diffuser ses phéromones. Les insectes vont s’habituer à sa présence et elle sera acceptée avant même de sortir de la cagette.
Une fois ces quelques jours passés, une visite de contrôle est intéressante. L’apiculteur devra alors observer :
- le comportement des ouvrières
- la présence d’une ponte
- la présence de la reine
En présence d’une reine, les ouvrières sont plus calmes. Alors qu’une colonie orpheline est plus agressive que d’habitude et émet un bourdonnement sourd caractéristique.
La présence de la ponte est l’indicateur de succès, si l’on a introduit une reine fécondée. Sinon, il faudra attendre plus longtemps pour que la reine vierge effectue son vol de fécondation, puis ponde.
La présence de la reine rassure toujours l’apiculteur. Elle doit se déplacer sur les cadres de cire sans être malmenée par les ouvrières. Mais si la ponte est présente cela est déjà suffisant pour attester de sa présence.
La vidéo suivante présence une visite de contrôle. On constate que la reine a été acceptée par la colonie orpheline.
Quand faut-il introduire une nouvelle reine ?
On peut introduire une reine tout au long de la saison apicole, depuis le printemps jusqu’à l’automne. Il est d’ailleurs constaté que les reines sont plus facilement acceptées en fin de saison par les colonies orphelines. C’est pour cette raison, mais aussi pour préparer le printemps suivant, que les apiculteurs professionnels effectuent souvent le remérage au mois de septembre.
Lorsqu’une colonie est orpheline, il est préférable d’introduire la reine quelques jours après l’orphelinage. Cinq à sept jours sont un bon laps de temps. Après avoir détruit les cellules royales, on placera la cagette qui contient la reine.
Que faire si l’introduction est un échec ?
Si malgré vos précautions, l’introduction d’une nouvelle reine est un échec, vous pouvez en réintroduire une nouvelle. Mais ce n’est pas toujours facile d’en obtenir rapidement. Les éleveurs de reines ont souvent des difficulté à satisfaire la demande.
Vous pouvez aussi introduire dans la colonie, un cadre de couvain ouvert sur lequel se trouve des oeufs et de jeunes larves. C’est-à-dire la base nécessaire pour relancer un élevage royal. Vous laissez alors les abeilles et la nature faire. Il est donc nécessaire de posséder plusieurs ruches au même endroit, afin d’être autonome pour effectuer ces manipulations urgentes.
La future reine élevée par la colonie devra alors être fécondée. Mais les faux-bourdons peuvent devenir rares après la saison des essaimages.
Nous espérons que cet article vous aura intéressé. Mais aussi qu’il vous aidera à obtenir de meilleurs résultats en apiculture de loisir. Nous vous souhaitons bonne continuation.